BOURSE – A condition d’être sélectif, la Bourse devrait encore offrir des opportunités aux investisseurs. Dans le contexte actuel de déploiement des plans de relance en Europe et aux Etats-Unis, des pans entiers de l’économie vont être stimulés. Un effet positif sur les résultats des sociétés est attendu.
Alors que la pandémie n’est pas encore enrayée, les marchés sont euphoriques. Depuis le 1er janvier, le CAC40 s’est apprécié de près de 15% et de 43,5 % sur un an glissant. Ayant franchi en mars dernier le cap des 6.000 points, cet indice se situe désormais au-dessus de son niveau à la veille de la pandémie. Toute la question est de savoir si ce rallye peut se poursuivre.
Les facteurs de hausse toujours présents
Tout d’abord, les économies européennes et américaines bénéficient toujours de deux soutiens forts. D’abord, celui des banques centrales : « Depuis le début de la crise sanitaire, elles sont à la manœuvre et mènent des politiques accommodantes afin de maintenir les taux d’intérêt le plus bas possible. Elles continuent d’injecter massivement des liquidités dans le système. Ces actions fortes et volontaristes constituent un vrai carburant pour l’économie », commente Bertrand Lamielle, directeur général de Portzamparc Gestion. Ensuite, chaque Etat a engagé un plan de relance destiné à stimuler des pans entiers de son économie qui tournaient au ralenti voire étaient à l’arrêt. Grâce à ces milliards injectés, l’activité va reprendre progressivement des couleurs. « Partout dans le monde, on s’attend à desniveaux de croissance très élevés », indique Guillaume Lasserre, responsable adjoint de la gestion chez La Banque Postale AM. Ainsi, les entreprises cotées commencent déjà à en profiter. « A long terme, le principal moteur des cours de Bourse est l’évolution des chiffres d’affaires et des marges », fait valoir Gilles Guibout, responsable des actions européennes chez AXA IM. Autre élément susceptible de dynamiser la cote : le déploiement des campagnes de vaccination partout dans le monde. Mais en dépit de ces bonnes nouvelles, certains restent méfiants. « La difficulté, c’est qu’aujourd’hui on a trop de certitudes. On ne voit pas d’où pourraient venir les mauvais coups, mais ils pourraient arriver », reconnaît Guillaume Lasserre. A ce jour, un risque est bien identifié : celui d’une potentielle surchauffe de l’économie engendrant un regain d’inflation. Mais rien n’est encore sûr.
Rotation sectorielle
Amorcé depuis l’annonce de la diffusion du premier vaccin anti-Covid en novembre, ce cycle haussier des marchés a donné le coup d’envoi de la rotation sectorielle. Autrement dit, les valeurs de croissance, dites « growth », qui avaient flambé durant les moments forts de l’épidémie pour cause de regain de leur activité sont aujourd’hui moins les vedettes de la cote. Inversement, les titres qualifiées de « value» des secteurs bancaires et de l’énergie surperforment. «Ce sont des titres décotés en 2020 pour cause d’une activité durement frappée par la crise sanitaire et les confinements à répétition », indique Florent Delorme, stratégiste financier chez de M&G. Si certains titres ont, depuis un an déjà, bien remonté la pente, d’autres restent encore à la traîne et sous-performent.
« Même s’il est encore trop tôt pour se positionner, la réouverture progressive du monde devrait à terme profiter à des secteurs tels que le tourisme, l’aérien, l’automobile et aux brasseurs », avance Julien Vincenti. Beaucoup d’observateurs estiment que cette rotation sectorielle n’est pas achevée car la relance ne fait que commencer et devrait en principe s’amplifier. Dans ce contexte, « mieux vaudra privilégier les actions européennes car le redémarrage de l’économie y est moins en avance qu’aux Etats-Unis. Exposés aux valeurs industrielles, les indices boursiers du vieux continent devraient en profiter », explique Régis Bégué, directeur de la recherche et de la gestion actions chez Lazard Frères Gestion. En zoomant sur la capitalisation des sociétés, grandes comme moyennes devraient profiter de cet élan. Lancé par l’Etat en octobre dernier, le label « Relance » est destiné à mobiliser les investissements vers les fonds propres des entreprises françaises, en particulier les PME et les ETI, cotées ou pas. Mi-mai, le ministère de l’Economie et des Finances comptabilisait près de 170 fonds ayant obtenu cette distinction. « Près d’un tiers de ces labels concerne des fonds de private equity et un autre tiers des OPCVM. Reste que cette attribution n’est pas liée à la qualité du véhicule. Nos notations sont assez disparates, s’échelonnant de 1 à 5 étoiles avec des distinctions entre les grandes et les petites capitalisations », commente Jean-François Bay, directeur général de Quantalys.
Valeurs de croissance VS cycliques
Dans le contexte actuel, faudrait-il tactiquement privilégier les valeurs cycliques au détriment de celles de croissance ? Il semblerait que ces deux catégories de titres aient toute leur place dans un portefeuille. Même si elles captent moins cet effet de reprise, les valeurs de croissance constituent des vecteurs solides et générateurs de performances. « Il n’est pas question de les laisser de côté. La crise sanitaire a accéléré la digitalisation de nos modes de vie. Et cette tendance ne va pas disparaître, au contraire elle devrait se poursuivre. Il convient donc de profiter de l’essor à venir de ces sociétés innovantes », affirme Gilles Guibout. Malgré sa forte volatilité et un risque en capital, l’investissement boursier a toute sa place dans une gestion de patrimoine. « Il n’y a jamais de mauvais timing pour entrer sur les marchés financiers, à condition de jouer la diversification. En revanche, ne pas y aller consiste à appauvrir son épargne. Reste qu’avant de s’engager il faudra s’assurer de disposer d’un horizon de placement de moyen ou long terme », rappelle Julien Vincenti.
Palmarès des fonds labellisés « Relance »
Article de Laurence Boccara publié dans Les Echos Patrimoine le 4 juin 2021